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Allez, viens boire un p’tit coup dans la famille imaginaire de Cédric Klapisch…
Parti faire le tour du monde, Jean revient chez lui en Bourgogne car son père est mourant. Après dix ans d'absence, il retrouve sa sœur Juliette et son frère Jérémie qui gèrent la propriété viticole depuis son départ. Alors qu'il ne devait rester que quelques jours pour les vendanges, il ne parvient pas à quitter la terre de son enfance et tente de resserrer ses liens distendus avec ses proches. Cédric Klapisch nous touche comme il ne l'avait pas fait depuis longtemps avec cette déclaration d'amour au vin et à la famille. S'il a une réelle culture du vin, tout ce qui relève de la technique et du jargon a été supervisé par Jean-Marc Roulot à la double casquette de viticulteur et de comédien qui apparaît également à l'écran en conseiller familial qui sait ne pas se mettre exagérément en avant. « J'ai failli faire ce film avant Casse-Tête Chinois. J’ai eu l’envie de faire un film sur le vin dès 2010. Cette année-là, j’ai contacté les quelques vignerons que je connaissais. Je n’avais jamais assisté à des vendanges et j’étais curieux de voir comment ça se passait. Je me disais – sans savoir pourquoi – qu’il y avait quelque chose à faire autour de tout ça. Jean-Marc a accepté que je vienne faire des photos pendant ses vendanges. À la suite de ça, je me suis dit qu’il fallait que j’observe précisément le changement des paysages en liaison avec le passage des saisons ». L'impression de réalisme est renforcée par cette approche du temps et de la nature. Les différentes saisons passées au sein de cette famille réunie permettent de partager les liens de cette fratrie dont les membres s'aiment mais se disputent, avant de se dire les choses restées tues pour mieux se retrouver. Ils sont campés avec justesse par trois comédiens réunis avec justesse par Cédric Klapisch. François Civil, particulièrement est une vraie révélation, sa présence explosant lors de deux scènes d'ivresse qu'il joue avec une précision hilarante rare mais aussi une émotion vive. Leur entente contribue pour beaucoup à la réussite de ce conte familial. « Pour constituer cette fratrie, je suis parti comme souvent des acteurs avec lesquels j’avais envie de tourner. Je venais de rencontrer Pio Marmaï et je me suis dit qu’il serait parfait pour ce rôle, qu’il avait aussi l’âge idéal. Je venais de travailler avec François sur la série Dix pour cent et je me suis dit qu’avec Pio, ils seraient deux frères très crédibles. De là, j’ai cherché l’actrice qui pouvait aller avec eux. Il fallait une fille avec la capacité d’exister entre ces deux mecs très masculins ! Ana Girardot a été de loin la meilleure. Ça a été génial de voir qu’ils s’entendaient bien tous les trois au point de devenir vraiment comme frères et sœur. À un moment, ils ont pris le contrôle du film. Au début, c’était un peu plus l’histoire de Jean/Pio Marmaï. Et puis, au fur et à mesure des saisons, c’est devenu l’histoire de cette fratrie. Ils ont pris le film en otage. Par la beauté de leurs rapports. » Cédric Klapisch a maîtrisé de façon inédite sa direction d'acteurs en les observant alors qu'ils se sont « imprégnés » des vins de Bourgogne qu'ils ont découverts en un temps record, n'étant arrivés que trois jours avant le début du tournage : « Ils sont arrivés à onze heures du matin, on est allé déjeuner, ils ont bu huit sortes de Bourgogne à table. Ambiance découverte du terroir… À 14 heures, ils étaient déjà complètement bourrés. Mais ça a continué, juste après, nous sommes allés visiter certains domaines. Ils ont parlé avec différents vignerons qui, à chaque fois, leur faisaient goûter différents vins et toute la journée ils n’ont fait que boire. À la fin de la nuit ils étaient tous les trois dans un état second...! Ça a été super important cette première journée, parce que c’est vraiment grâce à ça que j’ai su comment les diriger dans la séquence où ils sont bourrés. Quand on tourne, ils ne peuvent pas boire vraiment, donc il faut pouvoir reconstituer l’état. Là, je les ai bien vu, et j’ai pris des notes… La scène des consonnes par exemple a été inspirée par cette soirée. Donc ça peut paraître bizarre de dire ça, mais c’est vraiment de la préparation. Ce genre de moments fait partie de notre métier étrange. Pour nous, acteurs et réalisateurs, ça fait partie du boulot ! ». Cédric Klapisch prouve une nouvelle fois qu'il sait filmer les fêtes, comme s'il nous invitait à en faire partie au-delà de la barrière de l'écran et à partager les ressentis de ses personnages très attachants, que l'on regrette de quitter lorsque démarre le générique de fin. Pascal Le Duff.
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