Le retour à la terre

10h13 - 05 février 2018 - par Info Haute-Vienne

[caption id="attachment_229896" align="aligncenter" width="800"] Adrien et Perrine sont installés à Saint-Moreil.[/caption] Sauver des terres à vocation agricole pour installer des agriculteurs, telle est la raison d'être de Terre de Liens. L'idée est louable et l'ambition légitime. Fondée en 2003 dans la Drôme, l'association Terre de Liens a permis de sauvegarder du foncier et des bâtiments agricoles dans le but de faciliter l'installation d'agriculteurs. Elle a vu le jour après une réflexion engagée par plusieurs mouvements issus de l'éducation populaire, de l'agriculture bio et de la finance éthique et solidaire dans une démarche d'agriculture respectueuse de l'environnement. Une association a été créée dans chaque ancienne région dont le Limousin en 2011 avec pour objectif de recenser le collectif foncier, de se grouper pour acheter des terres pour les louer. « Cette démarche a rencontré un large écho auprès des citoyens se souvient Capucine Godinot, animatrice de l'association limousine. La mise en place de la Foncière Terre de Liens en 2008, structure d'investissements solidaire, a permis de concrétiser les premiers achats collectifs ». Celle-ci collecte les fonds de l'épargne populaire, achète les fermes pour les louer via un bail rural à clause environnementale. Les agriculteurs retenus doivent respecter la certification bio et porter un projet d'agriculture nourricière, excluant ainsi tout élevage de loisirs. En outre, la Fondation créée en 2013 et reconnue d’utilité publique peut recevoir des dons, legs et donations de fermes. Elle peut également acquérir des terres risquant de perdre leur vocation agricole. [caption id="attachment_229900" align="aligncenter" width="800"] Leur ferme a bénéficié d'un chantier participatif.[/caption]

Cinq fermes

En Limousin, la Foncière a acquis cinq fermes, à Coussac-Bonneval et Saint-Symphorien-sur-Couze, Soubresbost et Saint-Moreil (Creuse) et Saint-Privat (Corrèze). « Nous instruisons un dossier tous les deux ou trois ans, nous avons des demandes mais il manque parfois un élément pour que le projet d'installation aboutisse constate-t-elle, nous sommes très sélectifs en présentant à la Foncière des dossiers qui seront acceptés ». Deux acquisitions ont été réalisées en 2017 pour augmenter la superficie de deux fermes, des travaux ont aussi été effectués sur des bâtiments par des artisans ou lors de chantiers participatifs, ce qui nécessite un important travail de suivi. « L'objectif est de préserver des terres agricoles face à la pression de l'urbanisation assure Capucine, nous souhaitons faire passer cette réflexion auprès des Français : la terre est un bien commun comme l'eau et l'air, indispensable à notre survie, il faut donc protéger cette ressource ». Les cent-cinquante citoyens adhérents sont déjà dans cette dynamique de même que les 318 actionnaires et 118 donateurs en Limousin ayant permis de sauvegarder 170 ha de terres agricoles et d'installer dix-sept producteurs. [caption id="attachment_229901" align="aligncenter" width="800"]

Le collectif de Coussac-Bonneval compte onze associés.[/caption]

Moyens limités

Installés depuis un an aux Chénauds à Saint-Moreil, Adrien Denis et Perrine Tabarant ont pu concrétiser leur projet après une première installation en Haute-Vienne. « Cela ne nous enchantait pas de vivre dans un monde où l'agriculture est industrielle, nous voulions nous engager dans un projet paysan qui correspond à nos valeurs » raconte Adrien. Arrivés en Limousin avec un projet atypique de maraîchage en traction asine, ils disposaient de peu de moyens pour acquérir des terres, malgré un prix du foncier attractif. La quête va durer trois ans pour trouver un petit terrain et tester leur projet. « Cette expérience nous a permis d'entrer dans le réseau paysan puis nous avons appris qu'une ferme se libérait et contacté Terre de Liens » ajoute Perrine. Avec une production en bio et biodynamie, le couple a pu compter sur l'association. « Cela aurait été compliqué sans leur aide, l'accès au foncier était impossible car nous avions peu de réserves financières. Les banques nous ont accordé un emprunt, rassurées par ce soutien ». Sur leur ferme de douze hectares dont huit cultivables, ils font du maraîchage, élèvent des poules pondeuses et produisent des semences potagères. Un gîte complète leurs revenus. Depuis un an, « Aux ânes et caetera » commence à trouver sa clientèle. [caption id="attachment_229902" align="aligncenter" width="800"]

Les associés produisent notamment du lait.[/caption]

Onze associés

A Coussac-Bonneval, onze associés ont démarré leur activité il y a plus de deux ans après avoir repris la ferme de La Tournerie de 84 ha. Leur cheptel compte 17 chèvres, 12 vaches laitières Pie Noire et des cochons, complété par une production maraîchère sur 4,5 ha et la fabrication de bière et de pain. « Nous avons opté pour différents ateliers à forte valeur ajoutée avec un maximum de transformation pour une meilleure valorisation de nos productions » précise Jean-Baptise Favrichon, un associé. Leur installation s'est concrétisée après deux ans de démarches et la mise en contact avec Terre de Liens. « Leurs principes nous ont énormément séduits, notamment l'ambition de ne jamais revendre les terres agricoles et de limiter l'urbanisation. La ferme pourra également être transmise sans que les locataires suivants ne prennent d'importants crédits ». Le collectif a trouvé la ferme grâce au réseau alternatif après un an de recherche. Leur projet a été suivi en amont par l'association limousine qui l'a validé avant d'adresser le dossier à La Foncière pour accord. « Sans cette aide, nous aurions dû solliciter davantage les banques ajoute-t-il mais cela n'aurait pas remis en cause le projet, nous avons acquis les bâtiments et espérons que Terre de Liens pourra en devenir propriétaire afin de créer une unité transmissible ». D'ici deux à trois ans, leurs ateliers devraient atteindre leur vitesse de croisière. [caption id="attachment_229895" align="aligncenter" width="800"]