Radio days
[caption id="attachment_231040" align="aligncenter" width="800"] L'émetteur de Nieul a été mis en service en 1939.[/caption] Les membres de l'association « Ondes libres » envisagent de créer un musée dédié à l'histoire de la radiodiffusion dans l'ancien émetteur de Nieul, désaffecté depuis près de vingt ans.
Abandonné depuis des années, l'émetteur de Nieul reprendra-t-il vie un jour ? Tel est l'objectif de l'association « Ondes libres », créée en janvier 2017 par des membres de l'association « Mémoire de Nieul et alentours ». Au cours d'une réunions, l'une des fondatrices Solange Vincent Redon avait évoqué les trois projets envisagés par la Communauté de communes Aurence Vienne Glane, propriétaire de cet imposant bâtiment Art Déco depuis dix-neuf ans. « Ces projets ont tous capoté, celui de 2003 prévoyait un lieu dédié aux spectacles avec les métiers associés et l'accueil de troupes de théâtre raconte Gérard Patrois, le président d'Ondes libres, qui avait d'ailleurs suscité un certain engouement, puis celui d'un centre culturel en 2008 qui aurait englouti des sommes faramineuses enfin le dernier en 2012 lié à la culture avec un bâtiment new look qui aurait masqué le style Art Déco. Tous étaient très coûteux pour une structure comme la Communauté de communes ».
[caption id="attachment_231041" align="aligncenter" width="800"] Gérard Patrois se donne quatre à dix ans pour redonner au site.[/caption]Fondation
Dans ce dernier projet, l'architecte avait estimé la réhabilitation à 2.000 € le m² pour un bâtiment de 4.000 à 5.000 m², aujourd'hui très dégradé, livré aux visiteurs indésirables malgré une surveillance vidéo et des mesures de sécurité évaluées entre 20.000 € et 30.000 € par an. Gérard Patrois se base, pour l'heure, sur cette seule estimation afin d'estimer « à la louche » le coût de la réhabilitation de ce lieu chargé d'histoire, soit autour de 10 millions d'euros. Son projet est lui aussi très ambitieux, il ambitionne d'ouvrir un musée de l'histoire de la radiodiffusion grâce à aux pièces collectées par l'association ACHDR stockées à Saint-Aoustrille dans l'Indre. Un espace sera consacré à l'histoire de l'émetteur durant la seconde guerre avec un partenariat à définir avec le Centre de la Mémoire d'Oradour, de même qu'un espace ludique pour faire découvrir la diffusion des ondes aux jeunes et un espace pour développer leur créativité dans ce domaine, à l'image du Palais de la Découverte. Enfin, une pépinière d'entreprises dans le domaine de la télématique pourrait accueillir des porteurs de projets. « Pour lancer le projet, le premier objectif est de constituer une fondation abritée dès cette année, à savoir sans capacité juridique, dont la Communauté de communes serait membre poursuit-il, elle ferait donation du bâtiment et du terrain de 9.000 m² à l'association. Elle serait adossée à la Fondation de France et aurait une certaine crédibilité pour attirer des entreprises et des particuliers payant l'ISF qui pourraient participer au financement. Il faut faire appel à des fonds privés pour avoir une chance de faire aboutir ce projet. Je sais que des grandes entreprises disposent de sommes importantes pour cela ». Le coût global reste à chiffrer et Gérard Patrois estime qu'il faudra quatre à dix ans pour le mener à son terme. La question sera abordée, le 26 avril, en Conseil communautaire.
[caption id="attachment_231042" align="aligncenter" width="800"] La bobine de Ruhmkorff conçue vers 1850.[/caption]Résistants
Construit en 1937 et mis en service deux ans après, cet émetteur faisait partie du Plan Férié, un général chargé d'assurer la couverture radiophonique du pays. « Comme ce fut l'un des derniers construits, il était plus moderne et développait une puissance 200 Kw, mais son fonctionnement nécessitait un bâtiment de cette superficie ajoute-t-il, il a fonctionné dès 1939, rediffusant sur le sud-ouest les émissions de la Tour Eiffel puis les messages de propagande sous le régime de Vichy ». A partir de 1942, l'émetteur de Nieul est occupé par environ vingt-cinq Allemands sous le commandement du Lieutenant Engelhardt, un civil expert dans un domaine et mobilisé comme gradé. Ils surveillaient les dix-neuf techniciens français en poste sous la direction du chef de centre Marcel Villatte (futur beau-père de Gérard Patrois) et du contrôleur des travaux Georges Sonntag, un alsacien parlant allemand. Les deux hommes ont participé à des faits de résistance, profitant de leur position privilégiée pour intercepter des messages et informer le maquis après avoir détourné la ligne radio. « Après le massacre d'Oradour, les F.F.I. ont mené une opération en gare de Couzeix, le 10 juillet 1944, pour capturer deux civils français de la Gestapo explique-t-il, ceux-ci ont été tués ainsi que six soldats dont le lieutenant Engelhardt et le dénommé Marx qui fournissait des renseignements précieux à Georges Sonntag ». Courant août un combat aérien s'est déroulé au-dessus de l'émetteur touché par des impacts de balles. « Marcel Villatte et Georges Sonntag en ont profité pour substituer des tubes à incandescence en parfait état de marche par des tubes usagés et ils les ont camouflés sur place. L'émetteur ne pouvait plus émettre. Les résistants et quelques techniciens avaient abattu des arbres pour bloquer les routes menant à l'émetteur. Avant la libération de Limoges, les Allemands avaient entreposé à la caserne Beaublanc des organes cruciaux de l'émetteur, dont les tubes hors d'usage. Le jour de la libération, les techniciens aidés par des F.F.I. ont récupéré le matériel à leurs risques et périls. Vingt-quatre heures après, les émissions la B.B.C étaient rediffusées par l'émetteur d'une puissance de 20 KW et douze heures plus tard, il développait une puissance 100 KW et reprenait ses émissions au profit de la résistance régionale ». Un pan de notre histoire à découvrir...
[caption id="attachment_231043" align="aligncenter" width="800"] L’un des premiers émetteurs récepteurs datant de 1910.[/caption]Corinne Mérigaud Photos © C. Mérigaud et P. Morand pour Ondes libres
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