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Rites funéraires : des traditions limousines qui s’étiolent

00h24 - 29 octobre 2018 - par Info Haute-Vienne

[caption id="attachment_233036" align="aligncenter" width="800"] Des bols retournés sur les sépultures (© « Periberry)[/caption] Qui ne s’est pas interrogeait en voyant des bols, souvent retournés, sur les sépultures notamment en Marche limousine mais également parfois dans certains cimetières de la Haute-Vienne ? Si de prime abord, d’aucuns pourraient penser que ces bols déposés sur les tombes sont liés à l’activité porcelainière de Limoges et de la Haute-Vienne, l’explication est toute autre. Le rite funéraire de l'écuelle du mort (plutôt en Indre et dans le Berry) et celui du bol dans les départements limitrophes (en Marche et néanmoins dans certains cimetières de la Haute-Vienne), auraient une origine plus « fonctionnelle ». Ce contenant permettait de verser l'eau bénite. Comme il s'agissait également du bol utilisé par le défunt, ce serait un objet du quotidien emporté dans la mort, comme c'était déjà le cas pendant l'Antiquité. Parmi les anciens, on raconte qu’une vieille femme tenait un bol auprès du cercueil. Alors que le cortège arrivait, elle aspergeait le cercueil. D’autres avancent que lors de la mise en bière, le bol était rempli d'eau bénite et les proches, les amis, les voisins, venaient jeter l'eau bénite avec une branche de buis qu'ils trempaient dans le bol. Puis, le bol était apporté au cimetière où il restait sur la tombe et parfois y était semi-enterré. Outre l’aspect pratique, il existerait d’autres significations : dans l’Antiquité, la tradition était de nourrir les morts. Y aurait-il une survivance de cette façon de voir la vie après la mort ? Enfin, les bols sont retournés afin qu’ils n’explosent pas et ne se brisent pas lorsque l’eau de pluie gèle… A noter que dans certains « pays », la vieille formule « Il a laissé son écuelle » est une périphrase pour annoncer la mort de quelqu’un. [caption id="attachment_233037" align="aligncenter" width="800"] Les protège-couronnes étaient moins onéreux que des chapelles[/caption]

Protège-couronnes

Si certains rites tombent en désuétude après la seconde guerre mondiale, d’autres perdurent, notamment en Creuse, avec des tombes à auvent, appelé des protège-couronnes en verre ou en zinc. Elles protègent des intempéries, de l’humidité, de la pluie, du vent, de la neige et permettent d’éviter d’abîmer les couronnes que les familles déposaient sur les tombes. Cet aménagement était moins coûteux qu’une chapelle ou une construction en briques. Les traditions limousines funéraires ne manquent pas. Elles sont comme un lien indéfectible qui relie le monde des morts avec celui des vivants. Mais ces rites traditionnels tendent à s'étioler avec les nouvelles générations… comme de nombreuses coutumes ou croyances, qui ponctuaient la vie quotidienne.  

Anne-Marie Muia Photo : D.R.


[caption id="attachment_233038" align="aligncenter" width="800"] La lanterne aux morts de Rancon[/caption]

Lanterne des morts

Un phénomène architectural unique, localisé dans les diocèses de Poitiers, de Saintes et du Limousin va naître au XIIsiècle : l'élévation des lanternes des morts. Ces édifices, fûts de colonnes de quelques mètres de haut surmontés d'un fanal, sont souvent localisés au centre du cimetière. Or quand le cimetière est déménagé en périphérie du bourg, la lanterne demeure à sa place initiale, se retrouvant parfois au coeur du village, comme à Rançon (cf notre photo). Les lanternes des morts restent symboliques, elles apportent la lumière en un lieu de passage où les corps sont en attente de leur jugement et restent parfois dans l'errance ... Les lanternes, par la lumière qu'elles peuvent diffuser, sont riches d'un sens théologique et eschatologique. Elles représentent une véritable protection spirituelle voire corporelle pour les morts comme pour les vivants.

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