L'immobilier victime de la « greenflation » ?
Le 31e bilan de l'Observatoire de l'immobilier de la Haute-Vienne a été dévoilé en présence d'élus de la CCI et de la Ville de Limoges et des professionnels du CiLim 87, le club de l'immobilier de la Haute-Vienne.
Chaque année, l'Observatoire de l'immobilier livre une analyse très précise du marché dans le neuf, l'ancien, le locatif avec des témoignages de professionnels, acteurs du marché haut-viennois.
Ventes dans l'ancien
D'après les chiffres du service de la publicité foncière, le nombre total d'actes de vente enregistrés en Haute-Vienne a légèrement fléchi de 4 % sur un an. Pour les locaux d'habitation, la baisse est de 1 % entre 2021 et 2022. Le nombre de ventes en l'état futur d'achèvement (VEFA) est redescendu à 229, un niveau toujours élevé.
Deux tempos
L'année 2022 a pourtant bien démarré avec une attractivité équivalente des biens, des prix stabilisés vers le haut et des délais de ventes toujours courts. Malgré les craintes liées au contexte international, le marché n'a pas tremblé sur le 1er semestre. Les prix au m² selon les typologies montrent une augmentation des prix moyens.
Le deuxième semestre s'analyse différemment. L'attention s'est cristallisée autour de l'augmentation des taux d'emprunt catalysés par le fameux taux d'usure. La hausse des taux et l'inflation ont nettement ralenti l'emballement du marché. Les professionnels et clients ont dû revalider les capacités d'emprunt, réajuster les critères de recherche et tenir compte de l'augmentation des prix des matériaux et des travaux. Les délais de réflexion et donc de vente se sont allongés. Prémices d'un marché qui se retourne, les négociations sont revenues sur le devant de la scène. Malgré tout, l'atterrissage 2022 se fait en douceur avec 10 352 mutations de locaux d'habitation contre 10 473 en 2021.
« Nous ne pourrions pas parler de 2022 sans évoquer les questionnements liés à la chasse aux logements énergivores. Conséquence de la loi Climat et résiliences, les logements énergivores vont être progressivement sortis du parc locatif. Ce sujet a été LA grande question du second semestre des investisseurs et la crainte des propriétaires bailleurs. Que va-t-il se passer pour les propriétaires des logements mal étiquetés dont les DPE seront classés en E, F ou G ? », s'interroge Béatrice Loizeau (Orpi agence conseil).
Construction neuve
Le nombre de ventes d'appartements neufs a chuté de 59 % passant ainsi de 554 ventes en 2021 à 229 en 2022, mais en 2021, les volumes des ventes avaient été boostés par le cumul en commercialisation de nombreuses résidences services dédiées aux seniors ou aux étudiants.
Comparé à la moyenne annuelle de 182 logements vendus sur les dix dernières années, le marché de l'année 2022 a été dynamique avec une offre qualitative et diversifiée. Les ventes dans le cadre de l'investissement locatif sont largement majoritaires, avec des investisseurs venant, très souvent, des régions extérieures. Les acquéreurs au titre de l'habitation principale, sont essentiellement des seniors qui viennent vivre en ville. Les prix sont en hausse avec une moyenne de 3 700/€m2 contre 3 500€/m2 l'année précédente et tendent vers le plafond de ce qui est supportable par les clients.
« Début 2023, les ventes seront encore nombreuses puisque de nouveaux programmes ont déjà démarré, mais le ciel va vite s'assombrir dans le sillage de la tendance nationale. C'est une phase difficile qui s'amorce alors que les besoins et la demande sont là. La cause : les impératifs de sobriété foncière et de décarbonation de la production, les montages d'opération de plus en plus complexes et coûteux, créent une "greenflation" qui enraye la machine », note Dominique Renaudie, président du CiLim.
Foncier
Il faudra en moyenne 9 000€ de plus pour acquérir un terrain en lotissement dans Limoges et sa périphérie par rapport à l'année précédente, 6 000€ de plus pour un terrain en lotissement en secteur rural. La rareté de l'offre, voulue par les politiques, avec le retrait massif des zones constructibles est à l'origine de cette inflation record, aggravée par l'augmentation des coûts de viabilisation des parcelles. La commercialisation des terrains subit un fort ralentissement en corrélation avec la baisse des constructions depuis le deuxième semestre 2022.
La forte tendance à privilégier la construction hors Limoges observée en 2021 ne s'est pas confirmée en 2022 puisque les chiffres se rapprochent des moyennes observées ces dix dernières années : 44 % sur Limoges et périphérie et 56 % en secteur rural.
« 2023 ne permettra pas un regain de vitalité pour le secteur, affligé de contraintes encore fortes. Nous observons cependant que le territoire permet de devenir propriétaire d'une parcelle à moins de 30min du travail, à un coût encore raisonnable si nous le mettons en perspective avec les tendances nationales. Gageons que cela reste vrai pour l'attractivité de notre territoire », espère Candy Réjasse (Maisons JB).
Location neuf et ancien
Le marché locatif s'est stabilisé en 2022, avec un nombre équivalant de locations d'appartements et de maisons. Les loyers des studios et des T2 ont légèrement baissé, et les loyers des surfaces plus grandes ont augmenté. Pas d'évolution des loyers pour les maisons. La demande en meublé est constante mais attire de plus en plus d'investisseurs, attention que l'offre ne dépasse pas la demande. Le retour de logements neufs à Limoges a dynamisé le marché avec un niveau de loyer plus élevé.
« L'entrée en vigueur de plusieurs décrets de la loi de lutte contre le dérèglement climatique, avec l'interdiction depuis le 24 août 2022 d'augmenter les loyers pour les logements dont l'étiquette énergétique est classée en F et en G ; La loi sur le pouvoir d'achat du 3 août 2022 avec le plafonnement de l'indice IRL pendant 12 mois à 3,5 % bloquant ainsi l'augmentation des loyers ; Et enfin la loi Climat et résilience, qui interdit depuis le 1er janvier 2023 de louer les logements avec une consommation énergétique supérieure à 450 kwh m² d'énergie finale. Il en sera de même pour tous les logements classés G au 1er janvier 2025, et pour ceux classés F au 1er janvier 2028 », détaillent Valérie Lavaud (Citya Durivaud) et Véronique Brunet (Foncia Val de Vienne).
Les loyers des logements avec chauffage collectif ont dû être baissés afin de compenser l'explosion des charges. Les provisions ont été multipliées en moyenne par deux en 2022, mais l'enveloppe et la solvabilité des locataires n'ont pas augmenté. « Nous risquons de nous retrouver avec un nombre non négligeable de logements vides d'ici quelques mois. En effet, nous constatons déjà un nombre supérieur des préavis sur ce type de bien à la suite des régularisations de charges. L'année 2023 va malmener une partie des propriétaires et nous devrons les accompagner au mieux », concluent-elles.
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