Crédit Municipal : les dessous de Ma Tante
[caption id="attachment_229707" align="aligncenter" width="800"] Jean-Paul Souille, responsable de l'agence de Limoges, constate une activité soutenue.[/caption] Depuis près de 200 ans, on vient chez « Ma Tante » pour mettre en gage ses objets de valeur afin d'obtenir quelques liquidités... Une tendance qui se développe. Lundi, 10h. Les premiers clients de la journée poussent la porte du Crédit Municipal, établissement public à caractère social situé rue des Tanneries à Limoges. L'adresse est connue et on vient de loin pour déposer un objet en gage et obtenir immédiatement quelques euros. « Des déposants viennent de l'Indre, du Lot, de Charente-Maritime et de tout le Massif central pour déposer un objet et, vu le prix de l'essence, ce n'est pas pour un contrat de 30 euros, constate Jean-Paul Souille, responsable de l'agence de Limoges. Nous avons accueilli plus de 340 nouveaux clients en 2017 avec en moyenne plus de 40 contrats par jour soit 3.800 en cours. La Banque Publique des Solidarités est un bon indicateur de la conjoncture et elle est toujours morose ! Notre activité est soutenue depuis dix ans, la population a besoin de ce service ». [caption id="attachment_229708" align="aligncenter" width="800"] Des ménagères en argent mises en gage.[/caption] Discrets et un brin mal à l'aise, les déposants ne s'attardent pas une fois la transaction effectuée. Aucun ne souhaite témoigner du service rendu par cette institution qui a pignon sur rue depuis près de deux siècles en Limousin. Malgré tout, de nombreux citoyens ignorent l'existence du Crédit Municipal, rebaptisé en juillet dernier pour moderniser son image. Dépendant de la caisse de Bordeaux (présidée par Alain Juppé) depuis 2008, l'agence de Limoges poursuit la tradition de solidarité instaurée par les fondateurs. « Le prêt sur gage a été mis en place pour aider les populations qui avaient un besoin immédiat d'argent rappelle le responsable d'agence, ainsi ils déposaient des objets et on leur faisait un prêt. Le principe a peu évolué mais aujourd'hui, notre clientèle recouvre toutes les couches sociales ». Et les raisons de recourir à « Ma tante » - ou au « Clou » - sont diverses et variées : payer ses impôts, faire face à une dépense imprévue ou tout simplement boucler la fin du mois. « Depuis dix ans, nous avons une nouvelle clientèle, à savoir les retraités qui, dans notre région, touchent de petites pensions. Des personnes se retrouvent parfois seules et lorsque la chaudière lâche et que leur banque leur refuse un prêt, certaines déposent leurs bijoux en gage pour régler leur problème, confie Jean-Paul Souille, cela arrive souvent et c'est bien là notre mission sociale ». [caption id="attachment_229709" align="aligncenter" width="800"] Les émaux et porcelaine sont fréquemment déposés[/caption]
contrat de 2 ans
Pour obtenir un prêt sur gage, l'opération ne dure que quelques minutes : il suffit de venir avec son objet, une pièce d'identité et un justificatif de domicile. L'expertise des bijoux, en or exclusivement (18 carats voire 14), est rapide grâce à l’œil expert de Michel Dexet, qui repère les poinçons et vérifie au spectromètre. « C'est le seul appareil de ce type à Limoges, les bijoutiers nous l'envient, avoue-t-il. Il indique la composition d'un bijou comme dans cette chaîne qui contient 76% d'or, 12 % de cuivre et 11,5 % d'argent soit 18,3 carats ». Cet équipement permet de fiabiliser l'expertise et d'estimer la valeur de l'objet. Les bijoux représentent 80% des dépôts, mais sont également acceptés les objets d'art, tableaux et pièces en porcelaine expertisés par les deux commissaires-priseurs de Limoges, les ménagères en argent et pièces d'argenterie, des bouteilles de vins 1er grand cru plutôt d'origine française, des sacs à main de marque avec facture, des fusils de chasse juxtaposés ou superposés si le déposant est titulaire du permis de chasse et à condition d'avoir déclaré l'arme en Préfecture, des instruments de musique (expertisés par Music Passion), du matériel hi-fi, vidéo et du petit électroménager de moins d'un an avec facture, la décote étant rapide. La somme prêtée représente 30 à 50% de la valeur de l'objet, seulement 10% pour les instruments de musique faute de demande. [caption id="attachment_229710" align="aligncenter" width="800"] Michel Dexet vérifie la présence de poinçons.[/caption]7% vendus
Le contrat de prêt est établi pour deux ans, avec une périodicité de six mois, il est ainsi reconduit après paiement des intérêts. Il est annulé au bout de deux ans, mais un autre peut être établi afin que la personne puisse dégager son bien. Il est possible de récupérer ses objets à tout moment, avec rendez-vous sous 48 h, d'autant que l'établissement est ouvert toute l'année du lundi au vendredi. « Le déposant reste propriétaire de son bien et grâce à un système d'acomptes, il peut déposer des sommes d'argent pour diminuer le capital prêté et dégager son bien au plus vite précise-t-il. Seulement 7% des objets gagés sont vendus aux enchères ». Quatre fois par an, environ 250 objets sont mis en vente, si l'adjudication est supérieure au montant prêté et aux intérêts encourus, la différence est versée au déposant. En cas de vente à perte, celle-ci est supportée par l'établissement. Voilà quelques années, un diamant de 4 carats avait été adjugé plus de 12.000 € et quatre grands crus classés acquis plus de 1.000 €. Pour un lingot d'or d'une valeur actuelle de 35.000 €, l'établissement a déjà prêté 23.000 €. Pour financer le prêt sur gage, le Crédit Municipal propose des prêts personnels, du rachat de crédit et des placements solidaires qui assurent son budget de fonctionnement.Texte et photos : Corinne Mérigaud
[caption id="attachment_229711" align="aligncenter" width="800"] La chaîne est ensuite analysée au spectromètre.[/caption]
0 commentaires