Limoges : les grands dossiers de la Ville et de l’Agglo
[caption id="attachment_230195" align="aligncenter" width="759"] Emile Roger Lombertie : « La Région ne s’arrête pas à l’estuaire de la Gironde » (© Thierry Laporte / Ville de Limoges).[/caption] Avec chacune leurs compétences propres mais souvent complémentaires, la Ville de Limoges et Limoges Métropole sont au cœur de nombreux projets et réalisations. Interview croisée d’Emile Roger Lombertie, le maire de la cité porcelainière, et de Gérard Vandenbroucke, le président de l’Agglo. Info Magazine : De nombreux travaux sont engagés en centre-ville de Limoges (place de la République, rénovation des halles centrales…). Il s’agit là de chantiers phares pour 2018… Emile Roger Lombertie : Effectivement. Ce sont des chantiers lourds et complexes qui vont durer, pour la place de la République, jusqu’en 2022 en deux phases distinctes – la place et son environnement qui seront terminés en 2020, la halle et son équipement cultu-rel ensuite – et, pour les halles centrales, jusqu’en 2019. Je suis conscient que ces chan-tiers vont troubler la vie de chacun d’entre nous. Mais ils sont indispensables et je crois profondément qu’ils constituent une condition essentielle au maintien de l’attractivité de notre ville et même, au-delà, à son renouveau. Après les rues piétonnes et la halle Carnot et parallèlement à notre politique d’animation et de rénovation de l’habitat, il faut continuer à travailler sur le centre-ville si nous ne voulons pas que Limoges s’éteigne. [caption id="attachment_230196" align="aligncenter" width="734"] Gérard Vandenbroucke : « Bordeaux a besoin d’un pôle d’équilibre aux spécificités affir-mées » (© Stéphane Marmain / Limoges Métropole).[/caption] Gérard Vandenbroucke : Tout ce qui contribue à l’amélioration du bâti est une bonne chose et Limoges Métropole participe financièrement à ces travaux importants en prenant en charge toutes les dépenses de voirie et d’assainissement afférentes aux projets des communes. Pour le réaménagement de la place de la République à Limoges, par exemple, Limoges Métropole s’est engagée à hauteur de 15,8 M€ HT. Le conseil régional de la Nou-velle Aquitaine a également été sollicité pour participer financièrement au projet de réno-vation des Halles Centrales et je suivrai ces dossiers personnellement. Ces projets consti-tuent le prolongement naturel des travaux réalisés de 2014 à 2017 dans les rues pié-tonnes du centre-ville de Limoges, réalisés et cofinancés par Limoges Métropole (3,1M€ : 70%). Avec les chantiers dont on parle depuis longtemps déjà, il reste beaucoup à faire. Au-delà du centre-ville, les entrées de ville sont également très importantes pour la redynami-sation du territoire telle l’entrée située au niveau du quartier de La Bastide, dont les tra-vaux, ont débutés en 2017 et sont financés à plus de 6,7M€ par la Communauté d’Agglomération. Limoges Métropole assume pleinement ses missions aujourd’hui, comme elle est prête à le faire demain pour l’entrée de ville des Casseaux. [caption id="attachment_230197" align="aligncenter" width="800"] La Bastide 2020 est un important programme de renouvellement urbain (© Julien Dodi-net / Ville de Limoges).[/caption]
AMELIORER LA QUALITE DE VIE
I. : Vous êtes chacun acteur de mesures visant les quartiers prioritaires, pour en diminuer les inégalités et améliorer les conditions de vie. A quel niveau et comment intervenez-vous ? E.R.L. : La Ville de Limoges est la seule commune de l'agglomération qui comprend sur son territoire des quartiers dits « prioritaires » au sens de la loi. Ils sont au nombre de 9 : La Bastide, Beaubreuil, le Val de l'Aurence Sud, le Val de l'Aurence Nord, les Portes Ferrées, le Vigenal, le Sablard, les Coutures, Bellevue. L'intervention de la Ville dans ces quartiers vise leur meilleure intégration dans la vie de la cité, la requalification de leur image sou-vent dégradée et, enfin, l’offre à leurs habitants des actions / équipements mis en place par les services municipaux. Pour cela, la ville s'appuie sur différents leviers. Pour le renouvellement urbain et le cadre de vie, la Ville pilote le « PRU 1 », le pro-gramme de Rénovation Urbaine qui pour l'essentiel se concentre sur les opérations de « La Bastide 2020 ». Dans ce cadre, elle coordonne les opérations des différents interve-nants (communauté d’agglo, Limoges Habitat, Etat, Dom’aulin…etc.) et conduit en son nom certaines actions - aménagement d'espaces publics, équipements - pour un volume financier important. Par ailleurs, elle porte dans le cadre de la préparation du Nouveau Programme de Renouvellement Urbain (« PRU 2 ») sur Beaubreuil, Val de l'Aurence Nord et Sud, et Portes Ferrées, la vision urbaine et opérationnelle des futurs programmes (études urbaines en cours). Elle sera là aussi maître d'ouvrage de certaines opérations. Dans le cadre de la politique municipale de l’habitat, la volonté de la ville est de rééqui-librer le logement social avec l'agglomération et de favoriser une plus grande mixité so-ciale dans tous les quartiers, tant en termes de « bâti » que de peuplement. Pour le volet cohésion sociale, de par sa proximité et ses compétences, la Ville est pré-sente pour accompagner la population et le monde associatif dans ces quartiers en orien-tant son accompagnement sur les besoins réels de la population et en l'adaptant aux spé-cificités du territoire concerné, et aussi par son action de droit commun : offre culturelle, sportive, éducative, médiation, sécurité,... G.V. : Concernant les quartiers prioritaires dans le cadre de la politique de la Ville, nous intervenons en effet sur le désenclavement du quartier de La Bastide, par des aménage-ments structurants. Ils permettent l’amélioration du confort et de la qualité de vie des habi-tants. Nouvelles voiries, transports urbains améliorés, résidentialisation s’ajoutent à la réa-lisation à venir d’un nouveau pont reliant La Bastide au quartier du Puy Ponchet. Actuel-lement, la création d’un rond-point au carrefour du boulevard Schuman est en cours de finalisation. Nous intervenons également en privilégiant la dimension humaine et en favo-risant l’aide aux associations qui œuvrent au sein de ces quartiers (à hauteur de près de 400.000 euros en 2017) mais également en facilitant la réinsertion vers l’emploi durable. [caption id="attachment_230198" align="aligncenter" width="800"] La maquette de la future place de la République (© Julien Dodinet / Ville de Limoges).[/caption]PRIORITE AU DESENCLAVEMENT
I. : Le désenclavement, intrinsèquement lié aux moyens de transport (routes, ferroviaire, aé-roport), est un sujet récurrent pour l’ex-Limousin, et par là-même pour Limoges Métropole et la Ville de Limoges. Quelles solutions préconisez-vous ? E.R.L. : Limoges a complètement raté le tournant des années TGV. A l’époque, la gauche contrôlait le pays, la Région, le département, l’agglomération, la ville et ainsi de suite. Toutes les conditions étaient réunies pour obtenir de l’Etat la desserte TGV de Li-moges. Vous connaissez le résultat. Aujourd’hui, s’entêter à la réclamer, c’est courir après une chimère. Pour ma part, je travaille – avec de nombreux parlementaires - sur deux chantiers prioritaires : la mise à 2x2 voies de la 147 pour relier Limoges au TGV à Poitiers et la rénovation en profondeur de la ligne de chemin de fer POLB de façon à gagner temps et confort. Mais là encore, il ne faut pas se bercer d’illusions. L’Etat est impécu-nieux : cela prendra du temps et nécessitera une entente parfaite entre les différents pro-tagonistes locaux, mais aussi régionaux au sens large du terme. Limoges seule ou entou-rée de sa seule ceinture, ne pourra pas grand-chose. Limoges avec le soutien de la Ré-gion et des départements voisins sera entendue. [caption id="attachment_230199" align="aligncenter" width="800"] Les travaux du boulevard Robert-Schuman se terminent (© Limoges Métropole).[/caption] G.V. : Le mauvais coup pour Limoges a été l’abandon du projet de la Ligne à Grande Vitesse qui était le seul projet à pouvoir assurer un véritable désenclavement pour le terri-toire à l’échelle européenne. J’en prends acte et cherche à développer des solutions al-ternatives. Pour le monde économique l’urgence est de rétablir des liaisons aériennes de qualité vers Paris et Lyon à des coûts accessibles. Demain je serai vigilant au respect des engagements pris dans le Contrat de Plan que j’ai signé avec le Président de la Répu-blique pour la ligne ferroviaire Paris-Limoges : une première tranche de 500M€ de travaux doit être réalisée dans les meilleurs délais. Concernant le réseau routier, en direction de Toulouse et Paris, le désenclavement rou-tier est aujourd’hui total et en partie gratuit. Je me réjouis de la mise en œuvre des travaux qui feront de la route Limoges-Angoulême (RN141) une 2x2 voies sur l’ensemble du par-cours. Et concernant la route Limoges/Poitiers (RN147), Limoges Métropole, au-delà de ses obligations, apporte un financement exceptionnel de 5M€ pour en accélérer son amé-nagement. [caption id="attachment_230200" align="aligncenter" width="800"] L’important chantier des halles centrales durera jusqu’en 2019 (© Julien Dodinet / Ville de Limoges).[/caption] I. : Pour vous, quel statut correspondrait le mieux à l’avenir de l’EPIC ? Communauté ur-baine ou métropole ? E.R.L. : La question n’est pas aussi simple. A terme, il est évident que le statut de Mé-tropole constitue pour notre ville la meilleure solution, la plus dynamique, la plus porteuse d’avenir. Cela-dit, la vraie question est la suivante : une entente entre Limoges, la ville-centre de l’Agglo qui compte pour 65% de sa population et 70% de ses ressources fis-cales, et ses 19 communes satellites est-elle possible ? Je l’espère et pense que ce sera sans doute le cas le jour où les responsables de la nomenklatura qui dirige l’Agglo cesse-ront d’affirmer que Limoges ne représente qu’un vingtième de l’EPCI. Il arrivera bien un moment où la « politicaillerie » et la rancune cèderont la place à l’intérêt collectif. Je reste optimiste. G.V. : On peut toujours rêver de « Métropole » mais elle est légalement inaccessible et je préfère porter mes efforts sur un passage en Communauté urbaine, possible dès au-jourd’hui. Cette évolution peut être immédiate avec un ultime délai qui, lui, est le 31 dé-cembre 2019. Ne perdons plus de temps sous-peine d’être la dernière agglomération de plus de 200.000 habitants en France à renoncer à cette formidable opportunité. Et en at-tendant, le veto du maire de la ville-centre fait perdre aux habitants plus de 10.000 euros chaque jour. [caption id="attachment_230201" align="aligncenter" width="800"] Ester Technopôle, symbole de la French Tech (© Christelle Rama)[/caption]2E POLE URBAIN DE NOUVELLE-AQUITAINE
I. : Comment est-il possible de relancer l’économie du territoire ? Et donc son attractivité ? E.R.L. : En France, les villes ne possèdent pas de compétences dans le domaine éco-nomique. Celles-ci sont le fait des EPCI et des Régions, en l’occurrence Limoges Métro-pole et la Nouvelle-Aquitaine. Pour autant, nous ne restons pas inactifs : je vous rappelle par exemple l’action entreprise avec les fonds que l’Etat avait versés lors du départ des régiments. Nos prédécesseurs avaient laissé un solde important de 500.000€ : nous l’avons consacré à aider des entreprises limougeaudes qui ont pu ainsi maintenir ou créer près de 200 emplois. Au-delà et à coté de notre action pour redynamiser le centre-ville, nous avons également entrepris de nombreuses démarches pour promouvoir Limoges, rajeunir son image. Le label « ville créative » accordé par l’Unesco –qui nous fait ainsi en-trer dans un réseau très fermé de 180 villes dans le monde – en est l’illustration. Mais il y a aussi « ville santé citoyenne » qui fait de Limoges un véritable laboratoire au plan national et je pourrais en citer d’autres. G.V. : Il ne s’agit pas de « relancer » l’économie du territoire – elle est bien vivante – mais d’accompagner sa croissance et pour cela, il n’y a pas de baguette magique et je veux des actions concrètes. Limoges Métropole a mis en place tout un dispositif autour de la French Tech pour favoriser les start-up (label thématique Healthtech obtenu en juillet 2016) et soutient quotidiennement les pôles de compétitivités de son territoire. De même, elle accompagne les entreprises dans leurs projets immobiliers et favorise leur implanta-tion en développant des zones d’activités attractives et ouvertes sur le monde. Le faible coût du terrain et des loyers, la qualité de vie constituent aussi des éléments de grande attractivité. Par ailleurs Limoges Métropole porte de grands équipements pourvoyeurs d’emplois : elle a construit un Zénith et un Centre aquatique unique en Nouvelle Aquitaine, L’Aquapolis et plus récemment un Vélodrome. Elle travaille à la réalisation d’un Bus à Haut Niveau de Service, tout électrique, à la création d’une Cité Industrielle de la Porce-laine et la Céramique et œuvre à l’internationalisation du parc d’activités d’ESTER Tech-nopole. Quant aux commerces, domaine de compétence des communes, je propose que Limoges Métropole puisse accompagner leurs efforts de celles-ci. [caption id="attachment_230202" align="aligncenter" width="800"] Rétablir des lignes aériennes de qualité vers Paris et Lyon est urgent (© aéroport Li-moges Bellegarde).[/caption] I. : Quelle est votre vision « personnelle » de la position de Limoges dans la Nouvelle-Aquitaine ? E.R.L. : Je regarde l’avenir. Limoges est en Nouvelle-Aquitaine, c’est maintenant un fait. Il reste bien sûr des incompréhensions qu’il nous faut combattre : la Région ne s’arrête pas à l’estuaire de la Gironde ; elle comprend aussi le Limousin et sa capitale his-torique qui constituent aujourd’hui le deuxième pôle de Nouvelle-Aquitaine, celui qui équilibre ce territoire plus grand que bien des pays. Le Président Rousset, avec qui j’entretiens d’excellentes relations, en est convaincu, j’en suis certain. Je le suis égale-ment. A nous donc, de nous retrousser les manches pour que Limoges assume et joue pleinement son rôle au sein de notre grande région. G.V. : L’Agglomération de Limoges doit impérativement garder sa place de 2e pôle ur-bain de la Nouvelle Aquitaine. Bordeaux, capitale régionale, a en effet besoin d’un véri-table pôle d’équilibre aux spécificités affirmées. Notre ambition et la volonté d’agir pour notre territoire dépend avant tout de nous. Le Pacte Métropolitain que je propose à la fois aux 20 communes mais aussi au Département, à la Région et à l’Etat en est la traduction concrète pour les trois ans qui viennent. Mais rien ne serait possible sans la mobilisation de tous nos concitoyens. C’est pourquoi j’invite chacune et chacun d’entre nous à partici-per activement aux conférences citoyennes qui se tiendront au printemps 2018. Elles permettront de réfléchir ensemble aux actions de terrain qui traduiront notre ambition par-tagée pour le développement de notre territoire. Faisons ensemble de ces « Etats Géné-raux » de notre territoire un nouveau départ pour notre démocratie locale.Propos recueillis par Anne-Marie Muia
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