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Thierry Guillemy

08h00 - 08 juin 2020 - par Info Haute-Vienne
Thierry Guillemy
« Le lieutenant de louveterie intervient toujours sur ordre du préfet » - ©

En bons policiers de la nature, les lieutenants de louveterie interviennent bénévolement pour protéger les populations locales en lui permettant de cohabiter pacifiquement avec la faune sauvage. Interview de leur président départemental.

Qu'est-ce qu'un lieutenant de louveterie ?

Les lieutenants de louveterie sont des bénévoles ayant une parfaite connaissance de la faune sauvage qui agissent sous l'autorité du préfet lorsqu'il faut résoudre des situations délicates. Ils sont nommés pour cinq ans. À l'origine, ce corps a été créé par Charlemagne pour protéger la population du loup, qui proliférait faute de prédateurs. Aujourd'hui, le lieutenant de louveterie veille à ce que la faune sauvage ne trouble pas la sécurité publique, lorsque, par exemple, des animaux envahissent les zones urbaines dans lesquelles ils se procurent plus facilement de la nourriture.

Quelles sont vos missions ?

Nous apaisons les conflits pouvant naître entre les acteurs de la ruralité, principalement par la conciliation, en agissant avec discernement. En Haute-Vienne, les lieutenants sont répartis sur 22 secteurs. Ils doivent connaître parfaitement leur territoire et être rapidement mobilisables, car ce sont eux qui dirigent les opérations décidées par le préfet. Ils peuvent être aidés par d'autres lieutenants ou des chasseurs. La régulation létale est généralement le dernier recours. Il a quelques années, nous avons été amenés à réguler des chevreuils qui s'introduisaient régulièrement sur l'A20 et causaient des accidents graves. Nous menons aussi des interventions sanitaires, par exemple, pour éviter la propagation de la tuberculose bovine, qui est véhiculée par le blaireau, un animal porteur sain.

Tout le monde peut postuler ?

Nous recherchons des candidats bien intégrés dans leur territoire, car la plupart de nos missions repose sur la médiation. Le cursus de recrutement s'achève par une épreuve écrite et l'audition par un jury. Nous avons de plus en plus de difficultés à recruter des lieutenants, car en plus d'être entièrement bénévoles, ils doivent intégralement supporter les frais des missions. L'an dernier, nous avons réalisé 594 interventions, et chacun d'entre nous a été amené à parcourir plus de 4 000 km.

Que se passe-t-il lorsqu'il s'agit d'espèces protégées ?

Si nous devons intervenir sur des espèces protégées, il faut qu'un arrêté ministériel déclasse temporairement la protection. Avant d'obtenir l'autorisation de tuer un loup, qui est protégé par deux conventions européennes, il faut avoir épuisé tous les moyens de prévention. Certains éleveurs haut-viennois ont subi des attaques, mais elles étaient d'un autre canidé. Nous avons cependant suivi des formations pour relever des indices d'attaque de loup, qui sont ensuite soumis à des spécialistes de l'espèce.

La cohabitation entre la faune sauvage et les habitants est-elle paisible ?

Lorsque les attaques ou dégâts se multiplient, nous devons avant tout rassurer les populations et leur rappeler qu'il est interdit de piéger ou de tuer un prédateur protégé, même s'il a décimé tous les animaux de compagnie de la famille. Nous dispensons donc des conseils de protection des animaux domestiques. Mais, lorsque des sangliers labourent une pelouse ou un terrain de sport ou qu'un cervidé grignote les joints des fenêtres, la facture peut vite être salée. Dans le cas de dégâts avérés et chiffrés, il est plus facile d'obtenir l'autorisation d'intervenir. Nos missions sont toujours ponctuelles et raisonnées, car il n'est pas question d'exterminer une espèce sous prétexte qu'elle nuit aux activités humaines. Nous sommes de précieux alliés des autorités locales.

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