21 avril 1944 : les femmes deviennent enfin des électrices

À l'occasion des élections municipales, les 29 avril et 13 mai 1945, les femmes votent pour la première fois. Elles obtiennent ce droit avec la signature de l'ordonnance du 21 avril 1944 par le général de Gaulle.
Alors que la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, publiée en 1791 par Olympe de Gouges, affirmait que si « la femme a le droit de monter sur l'échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune », le suffrage déclaré « universel » en 1848, ne l'a été que pour la moitié masculine de la population française durant presque 100 ans.
Au sortir de la première guerre mondiale, les femmes réclamaient déjà le droit de vote. Après une longue lutte, les militantes étaient sur le point d'avoir gain de cause : les députés avaient adopté la proposition de loi censée permettre le suffrage des femmes, mais en 1919, les sénateurs hostiles s'y sont opposés fermement.
Le droit de vote des femmes a été obtenu voire gagné par des combattantes, au sens propre comme figuré, dont la ténacité, le courage et la résilience ont permis de ne jamais renoncer.
29 avril 1945
Près d'un siècle après les hommes, c'est donc au tour des femmes de se rendre aux urnes pour le premier tour des élections municipales. Le 29 avril 1945, 12 millions de Françaises sont appelées à voter pour la première fois.
« Les femmes ont également fait la guerre : elles ont travaillé comme infirmières et dans les fermes, dans les usines pour remplacer leurs époux, leurs fils partis au front. Aussi, lorsqu'elles ont obtenu le droit de vote, quelle ne fut pas leur surprise quand les hommes les ont accompagnées dans l'isoloir comme pour les surveiller ! Elles étaient très déçues », explique Christiane Savary, une habitante de Saint-Junien.
« Marthe, ma mère, ne voulait pas y aller. Elle disait qu'elle ne savait pas pour qui voter et comment il fallait faire. Dédé, mon père, lui avait répondu qu'il s'agissait d'une ''obligation'' et qu'il allait l'accompagner. Sans se démonter, elle lui avait lancé : ''Mais tu ne vas pas voter deux fois''. Il est certain qu'elle a dû voter comme son mari », relate la Saint-Juniaude, qui se souvient de cette histoire racontée maintes fois dans sa famille.
Aujourd'hui âgée de 83 ans, elle se remémore ces jours de scrutin : « A 8 heures, j'allais au bureau de vote avec ma grand-mère qui assurait ''ne pas avoir besoin d'un bonhomme pour savoir pour qui elle allait voter''. Puis l'après-midi, c'était avec ma mère et c'était notre promenade du dimanche. Enfin, le soir, j'étais avec mon père lors du dépouillement. J'étais une fillette mais j'aimais m'asseoir et rester auprès de lui ».
Électrices et éligibles
Toujours en 1945, les femmes prennent part au référendum et aux élections de l'Assemblée constituante mis en place par le général de Gaulle : 33 femmes sont élues.
En 1971, Christiane Savary, qui vote depuis ses 21 ans (alors l'âge de la majorité), devient conseillère municipale à Saint-Junien : « Non seulement j'étais une femme mais j'étais la plus jeune du conseil municipal à 28 ans. Nous n'étions alors que 5 conseillères sur 27. Les hommes nous décochaient qu'on était là pour faire joli ! ».
Si par l'ordonnance du 21 avril 1944, les femmes ont acquis l'éligibilité, celle-ci ne concernait pas seulement les mandats purement politiques. « J'ai surtout été élue pendant 40 ans dans un syndicat, et à l'époque, c'était une affaire d'hommes, qui ne concevaient pas d'asseoir une femme à la table des négociations ».
Puis sont arrivées les grandes grèves de mai 68. « Les politiques ont enfin reconnu que les femmes pouvaient être à la tête des syndicats. Mais par la suite, les hommes ont essayé de les remettre aux fourneaux. En fait, on avançait trop vite et on prenait seule des décisions. Cette période a marqué un grand tournant dans la vie des femmes, comme un déclic ».
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