RCF : 40 ans de « Point Show » dans « Vies d'Envies »
A Limoges, au fil du temps, leur magasin a pris la dimension d'une véritable institution où l'on célèbre le culte de la déesse Euterpe avec un plaisir gourmand non feint : depuis quarante ans, associés à la tête de « Point Show », Bruno Marvier et Didier Demaison militent farouchement de concert pour maintenir l'esprit d'un commerce indépendant, à l'opposé des grandes enseignes soumises par leurs centrales d'achat à la loi des produits ciblés générant avant tout le profit et favorisant la banalisation par la standardisation.
Compétents et volontiers pédagogues, tous deux mériteraient d'être labellisés « espère rare en voie de disparition », donc « espèce à protéger » ! La seule médaille honorant ces valeureux irréductibles relève de la reconnaissance témoignée par une clientèle attachée au professionnalisme d'un service générant, ici, la longévité de l'officiant, et là, la satisfaction du quêteur. Demandez un conseil ou une référence discographique à « Bruno-l'encyclopédique » et vous serez éclairé, informé, avec la rapidité d'un computer, le clin d'oeil en sus ! Top !
Le sillon, le duo a commencé à l'ensemencer en octobre 1977 au 83 de l'avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny en investissant chacun 5.000 francs empruntés à leur mémé ; un challenge osé, néanmoins relevé avec l'insouciance et le culot de deux ex-lycéens fans de rock, de classique et de chanson française. A vingt ans, sans expérience du commerce, sans pratique des réseaux de l'édition phonographique, ils s'exposaient à une concurrence solidement implantée nommée Arpèges, Ambiance, Cristal Music, 100.000 Chansons, Madison, Juke-Box qui deviendra Nuggets, disquaires auxquels s'ajoutaient les rayons spécialisés des Nouvelles Galeries, Monoprix, Pénicaut, vite rejoints par les grandes surfaces alimentaires, puis par La Boîte à Disques, Harmonia Mundi, Anecdotes, L'Autre Disquaire, etc. Au milieu des 80's, Limoges compta jusqu'à dix-sept disquaires !
Trop excentré, en octobre 1988, « Point Show » profita d'une opportunité conjuguée à l'envol des ventes de compact-discs pour transférer son activité en centre-ville, au 6 de la rue Elie-Berthet. Là, dans un paysage concurrentiel qui n'eut de cesse d'étioler, Didier Demaison, ex-vice-champion de France de karaté et actuel vice-président de la Ligue de cet art martial, et son pote Bruno Marvier, mélomane distingué, installèrent un phare à fort rayonnement qui aura résisté à l'implantation locale de nouveaux réseaux (Leclerc, Fnac, Cultura) en même temps qu'aux téléchargements et à la vente sur le net, dérives ayant pour conséquences l'effondrement abyssal du marché (entre 2002 et 2007, les ventes de disques ont plongé de 75% !) et son corollaire : la fermeture en cascades des disquaires indépendants.
Aujourd'hui, Didier et Bruno font figures de « derniers des Mohicans » dans un univers principalement motivé par la rentabilité plus que par une inspirée et indispensable diffusion de la culture, induisant le nivellement par le bas. Eliminé dans les années 90 par l'émergence du CD, vingt ans plus tard les galettes nervurées en vinyle, samplées par les dj's et les chantres du rap et de la techno, ont pris leur revanche (jusqu'à 70% des ventes) et joué les bouées de sauvetage ; un retour célébré lors des annuels « Disquaires Days », les journées des disquaires indés (de 3.000 dans les 70's, leur nombre est tombé à 330). Le disque n'est pas mort : il gratte encore !
« Notre force, explique Bruno Marvier, c'est notre passion pour la musique et notre souci de rendre service à ceux qui l'aiment. » Une louable profession de foi dont on souhaite qu'elle puisse s'exprimer longtemps encore ! Dans l'intérêt général.
« Vies d'Envies », de Chris Dussuchaud, sur RCF Limousin : jeudi 30 novembre de 20 h à 22 h, rediffusion dimanche 3 décembre de 16 h à 18 h (99.6 à Limoges, 100.2 à St-Yrieix, 107.4 à Bellac, 105.8 à St-Junien, 95.8 à Guéret, 89.4 à Aurillac, 91.4 à Brive, 106.9 à Tulle et Egletons, 102 à Ussel, 89.3 à Argentat).
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