Sécuriser une ressource de plus en plus précieuse
Peu chère et disponible en permanence, l'eau potable fait partie de notre quotidien. Nous en usons à l'envi alors que nous devrions en prendre soin, car cette denrée essentielle à la vie pourrait se raréfier si nous n'y prenons garde.
Le geste d'ouvrir un robinet pour se servir un verre d'eau potable est tellement banal qu'on en oublie souvent que cet élément essentiel à la vie a franchi diverses étapes avant d'arriver jusqu'à nos lèvres. Composé en majeure partie de roche granitique, le centre de la France ne capte pas l'eau, mais la laisse ruisseler vers les côtes. Il ne dispose donc pas d'importantes nappes souterraines, raison pour laquelle, au début du XXe siècle, des retenues et des lacs ont été créés. C'est notamment le cas au nord de Limoges, avec le Mazeaud, la Crouzille, Gouillet et Beaune. Avant d'être distribuée aux 208 705 foyers de Limoges et des huit autres communes du nord de la ville, cette eau brute doit être potabilisée.
« Cette eau arrive ici par gravité, de manière naturelle, sans avoir besoin de dépenser de l'énergie pour la pomper, ce qui est un gros avantage aujourd'hui. Dès leur création, ces réserves ont été surdimensionnées, de sorte qu'aujourd'hui, nous disposons d'une avance confortable de plusieurs mois sur la consommation, ce qui est loin d'être le cas dans des métropoles équivalentes à la nôtre », se réjouit Philippe Janicot, vice-président de Limoges Métropole, en charge du cycle de l'eau.
BAISSE RÉGULIÈRE
Ce confort ne doit pas nous inciter à gaspiller l'eau, bien au contraire. « Depuis une vingtaine d'années, nous constatons une baisse de la consommation, alors que le territoire connaît une hausse du nombre ses habitants. Cela s'explique, certes, par une prise de conscience de l'importance de ne pas gâcher l'eau, car nous menons régulièrement des campagnes de sensibilisation, mais surtout par l'évolution des technologies pour économiser l'eau. L'amélioration de l'utilisation de cette ressource permet d'en faire bénéficier plus de monde, notamment les habitants de Saint-Junien et Rochechouart qui sont désormais raccordés à notre réseau », ajoute-t-il.
Le syndicat des eaux Vienne Briance Gorre, qui distribue l'eau dans 57 communes au sud de Limoges, envisage quant à lui de réhabiliter d'anciens captages abandonnés. « Avec l'enchaînement des périodes de sécheresse, l'eau devenant plus rare, nous envisageons de reprendre l'exploitation de certains captages, même si cela risque de faire augmenter le prix de l'eau », avoue son président, Maurice Leboutet.
Dans certains endroits, le niveau des réserves a déjà atteint celui qu'il devrait être fin juillet. Cette situation a conduit la préfecture de Haute-Vienne à placer le département en vigilance, car les récentes pluies orageuses n'ont pas permis de compenser un déficit pluviométrique atteignant 30 %. Tous les usagers de l'eau, tant prélevée dans le milieu naturel que sur le réseau d'eau potable, sont donc appelés faire preuve de civisme et d'écoresponsablilité en modérant leur consommation. Si la situation continue de se dégrader, des restrictions d'usage, comme le remplissage des piscines privées ou l'arrosage des jardins, pourraient être ordonnées.
SANCTIONS POSSIBLES
L'État pourra compter sur les dix agents assermentés de l'Office français de la biodiversité de Haute-Vienne pour les faire respecter. « Nous contribuons d'abord à sensibiliser et à prévenir. Nous travaillons en lien avec la gendarmerie et la police nationale lorsqu'il s'avère nécessaire de sanctionner les écarts. Les infractions sont alors constatées par procès-verbal transmis au Procureur de la République qui décide ensuite de prendre des sanctions ou non », explique Stéphane Vighetti, le chef de ce service. En 2020, sur 108 contrôles effectués, seules 4 infractions ont été relevées.
La direction de l'eau surveille également les fuites sur les 1 025 kilomètres de tuyaux de son réseau de distribution. Philippe Janicot réaffirme sa fermeté à l'encontre de ceux qui déverrouillent les bornes à incendie. « Nous appliquons des sanctions financières, mais nous devons également faire preuve de pédagogie autour du danger que représentent des tels actes », prévient-il avant de préciser que Limoges Métropole va aider à l'installation de récupérateurs d'eau pluviale pour arroser les jardins, ou alimenter les toilettes et les machines à laver.
TRAITEMENT CONTINU
La quantité d'eau potable disponible est directement liée à la capacité de traitement de l'usine de La Bastide et au volume de stockage de la dizaine de réservoirs disséminés sur le territoire.
Car si elles sont de bonne qualité, les eaux de surface sont généralement acides et insuffisamment minéralisées. De plus, en ruisselant le long des collines, elles se sont chargées de matières organiques en suspension qu'il va falloir éliminer. C'est le rôle de la station de la Bastide, qui rend potable 78.000 m3 d'eau par jour. « La première étape servira à clarifier l'eau par décantation et filtration sur sable. C'est un préalable indispensable à la poursuite du processus de traitement. Nous allons ensuite la reminéraliser en injectant du calcaire et du dioxyde de carbone. Puis, l'eau franchira une triple barrière de désinfection. Elle sera bullée avec de l'ozone, un gaz produit sur place, qui va se dissoudre dans l'eau pour oxyder les cellules des micro-organismes, avant d'être irradiée aux rayons ultraviolets, qui endommageront les germes restants. La dernière désinfection consistera à ajouter un peu de clore, pour s'assurer d'éliminer les éventuelles dernières bactéries présentes », détaille Jean-Luc Viallesseche, chef du service de production de l'eau potable. Ces traitements sont réalisés en permanence et la potabilité de l'eau est analysée en continu afin de vérifier que les process sont fonctionnels. « Tous nos instruments de mesure sont connectés au poste de commande derrière lequel se relaient des agents 24h/24 et 7j/7 pour assurer la continuité de la distribution de l'eau. Nous surveillons également le débit des canalisations afin de repérer une fuite sur le réseau », précise-t-il.
Ces différentes étapes valorisent l'eau sortant de nos robinets. Une raison de plus pour ne pas la gaspiller.
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