RCF : Angelique Ionatos dans « Vies d'En-vies »

Après avoir incarné la mère courage et révoltée du « Stabat Mater Furiosa » de l'écrivain Jean-Pierre Siméon, sa première prestation pour le théâtre impulsée en 2014 par Michel Bruzat, Angelique Ionatos a naturellement repris sa guitare pour entraîner sa voix grave et sensuelle dans le creuset de la poésie et de la musique grecques. Fille de marin, élevée sur le port du Pyrée par une mère amoureuse des lettres, exilée à treize ans avec ses parents à Bruxelles pour fuir la dictature des colonels, son destin s'accéléra lorsque, avec son frère Photis, de quatre ans son aîné, ils  gagnèrent un radio-crochet leur permettant d'enregistrer un disque à Paris. Sorti en 1970, « Résurrection » glana d'entrée le Prix de l'Académie Charles-Cros ! Quatre décennies et vingt disques plus tard, fidèle à une langue dont elle dit qu'elle est sa patrie, Angeliki entretient toujours fièrement et rageusement une flamme intense nourrie à la sève des poètes grecques comme Kapsalis, Palamas, Mortoyas, Karyotakis, Ritsos et surtout Odysseas Elytis, prix Nobel de littérature en 1979 auquel elle a consacré un recueil, « Le soleil sait », une anthologie amoureuse et vagabonde publiée aux éditions Cheyne. Femme de convictions, solaire, fière, sensible, quand il s'agit de dénoncer la toute puissance des oligarchies financières qui traçent nos destins et ont mis à genoux sa Grèce, elle se retrouve totalement dans la pensée d'un Gabriel Celaya (« La poésie est une arme chargée de futur ») et d'un René Char (« L'acquiescement éclaire le visage. Le refus lui donne la beauté »). Sa douceur, sa mélancolie, son cri, sa douleur, sa colère, subliment son chant admirable et poignant tout au long de son dernier disque « Reste la lumière » dont on retrouvera l'essentiel et bien d'autres perles les 16 et 17 juin au Théâtre de La Passerelle : immanquable !