Tous mobilisés pour donner
La situation sanitaire risque de se transformer en une crise économique et sociale dont les associations caritatives commencent à percevoir les premiers signes. Fortheureusement,la solidarité se renforce et les dons affluent de toutes parts.
«Les gestes barrière n'ont pas brisé ce lien humain qui forge l'ADN de nos bénévoles », se réjouit Marie-Hélène Lefebvre, responsable de l'équipe Limoges Centre du Secours catholique.
Et pour preuve, après les récentes inondations dans plusieurs départements français, les associations caritatives ont constaté une augmentation des dons.
La crise sanitaire a, en revanche, fortement chamboulé le fonctionnement de ces structures.
« Chaque semaine, nos accueillis venaient faire la cuisine avec nous, échanger des recettes et surtout partager un repas antigaspi préparé ensemble. C'était un important moment de convivialité que nous avons hâte de pouvoir retrouver », avoue M-H Lefebvre. Car, au-delà du don, qui permet de pallier une situation de crise, les équipes du Secours catholique jugent essentiel d'accompagner les bénéficiaires pour développer « leur pouvoir d'agir afin de leur permettre de trouver le ressort nécessaire pour se remettre debout ». Durant le premier confinement, les élans de solidarité se sont multipliés et de nombreuses personnes désœuvrées ont proposé de donner du temps aux autres. « Nous avons eu la bonne surprise de voir arriver des jeunes bénévoles, souvent étudiants ou travailleurs privés d'activité par la fermeture de leur lieu d'exercice, qui nous ont aidés pour porter des colis alimentaires à domicile. Et pendant le deuxième confinement, ces navettes se sont aussi étendues aux cours de français. Nous avons ainsi pu développer des actions de proximité », constate la responsable de Limoges Centre.
DONS AUX ÉTUDIANTS
Depuis peu, de nouveaux bénéficiaires frappent à la porte. « Il s'agit principalement de personnes qui étaient au bord du gouffre, et qui, compte tenu de la crise, ont plongé dans la précarité, mais aussi des étudiants privés des ressources générées par les petits boulots. Cela nous a conduits à créer une cellule pour leur apporter des aides spécifiques, comme, le prêt d'ordinateur ou d'imprimante », précise Marie-Hélène Lefebvre.
Le local de Limoges Centre abrite également une épicerie et une boutique solidaire alimentée par de généreux donateurs. « L'épicerie est ravitaillée toutes les semaines en produits frais et secs par la Banque alimentaire. La boutique, qui propose des vêtements et un peu de brocante, est régulièrement approvisionnée par des personnes qui ont profité d'être enfermées chez elles pour trier ce qu'elles n'utilisaient plus. Notre boutique n'est pas uniquement réservée aux personnes en situation précaire. Elle attire notamment de nombreux jeunes, car la seconde main devient une tendance de plus en plus prisée par les consommateurs. Chaque objet a un petit prix, car la plupart de nos bénéficiaires ont exprimé leur désir de payer quelque chose en retour, comme dans un magasin classique », ajoute-t-elle.
DON DE SOI
Le Secours catholique est surtout très fier d'avoir pu maintenir ses maraudes durant cette crise sanitaire. « Nous avons été accompagnés par les Pompiers de l'Urgence Internationale qui ont expliqué à nos bénévoles comment rester proches des gens en gardant les distances de sécurité. C'était d'autant plus important que de nouveaux jeunes bénévoles sont venus renforcer nos équipes. Il était donc primordial de canaliser leur enthousiasme, car cette activité est classée en risque de niveau 3 », souligne la responsable, ravie de constater que cette crise a aussi renforcé la collaboration avec d'autres associations et déclenché de nouveaux élans de solidarité.
JUSTICE SOLIDAIRE
Le tribunal de grande instance de Limoges contribue aussi à accroître les dons d'une manière un peu particulière. Depuis environ deux ans, reprenant l'initiative née dans quelques tribunaux de province, le ministère de la Justice a souhaité redistribuer une partie des scellés, qui jusqu'à présent étaient détruits. La salle où ils sont entreposés se remplit rapidement, car les enquêteurs mettent sous scellés les objets dérobés aux victimes, mais également ceux ayant servi à commettre l'infraction.
« Les scellés illicites sont évidemment détruits. Certains matériels sont donnés aux forces de l'ordre et le reste est confié au service des Domaines. Mais, les objets dont la faible valeur ne couvre pas les frais de mise en vente sont détruits, alors qu'ils pourraient être utiles à certaines personnes ou associations œuvrant dans l'intérêt public. En arrivant à Limoges, j'ai découvert que des scellés de vêtements avaient été détruits. Nous avons donc signé une convention avec trois associations locales, la Banque alimentaire, la Croix rouge et le Secours populaire », explique Baptiste Porcher, le procureur de Limoges. Les objets collectés sont très hétéroclites : outils, petit électroménager, hi-fi ou consoles de jeux, voire de la nourriture. « Parfois, les victimes ne veulent pas récupérer les objets dérobés. Nous dressons donc une liste de ce qui est disponible et laissons aux associations le choix de ce qu'elles souhaitent prendre », précise-t-il.
TRIER AVANT DE DONNER
« Notre première réaction lorsque nous avons été contactés par les services du procureur a été la surprise, car nous n'imaginions pas qu'il soit possible de redistribuer des scellés. C'était quelque chose de complètement nouveau pour nous, mais comme nous avons l'habitude de récupérer des objets de tous les domaines de la vie quotidienne, cela ne nécessitera pas une logistique supplémentaire. L'an dernier, plus de 18 000 personnes sont venues apporter des objets à notre siège limougeaud. Nous trions et valorisons plus de 1 000 tonnes de dons par an grâce notamment à une dizaine de bénévoles qui sont devenus des spécialistes de la réparation de l'électroménager. Par principe, tous les objets que nous donnons ont été vérifiés auparavant », précise Thierry Mazabraud, le secrétaire général du Secours populaire de Haute-Vienne, heureux de contribuer à cette démarche à la fois solidaire et écocitoyenne.
L'association s'enorgueillit également d'avoir réussi, cet été, à faire partir un certain nombre d'enfants et de familles quelques jours en vacances pour s'aérer l'esprit. « Et avec nos opérations Père Noël Vert, nous avons pu apporter une aide matérielle à un peu plus de 1 200 familles, même si elles ont été privées de la convivialité habituelle procurée par nos soirées », ajoute-t-il.
Comme d'autres associations caritatives, le Secours populaire s'est aussi préoccupé de la santé de ses bénévoles qui ont vu leur engagement social s'arrêter brutalement, ce qui a pu entraîner un repli sur soi chez certains d'entre eux.
En première ligne depuis le début de la crise, ces associations, qui ont très tôt tiré la sonnette d'alarme sur la situation des plus démunis, se réjouissent d'avoir été entendues par des donateurs de plus en plus nombreux.
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