Anne Croguennec : "Chaque minute sans massage fait perdre 10 % de chance à la victime de s'en sortir"
Alors que les gestes qui sauvent ont été décrétés grande cause nationale en 2016, seulement 40 % de la population française y est formée. La nouvelle présidente de l'Union départementale des premiers secours de la Haute-Vienne (UDPS 87) veut poursuivre l'effort.
Quelles sont les actions de votre association ?
Nous organisons au moins une fois par semaine des sessions de formation de sept heures à la Prévention et Secours Civiques de niveau 1, qui peuvent être suivies par les salariés sur leur temps de travail, car il est toujours bénéfique pour une entreprise d'avoir une personne formée aux gestes de premiers secours parmi son personnel. Nous organisons également des formations théoriques à distance en e-learning avec une validation ultérieure des gestes techniques en présentiel durant quatre heures. Cette formule est très appréciée car elle perturbe moins l'organisation du temps de travail. Nous intervenons aussi dans les écoles, car nos formations sont accessibles aux enfants à partir de 10 ans. Ces derniers sont d'ailleurs très intéressés. Il faudrait également former systématiquement tous les artisans à ce PSC 1, car sur les chantiers il y a toujours des risques et il me paraît indispensable de savoir prendre en charge un salarié qui vient de se blesser. Par ailleurs, nous montons de nombreux postes de secours tout au long de l'année, lors de manifestations culturelles ou sportives, comme les matchs du Limoges CSP.
Quel est le niveau de formation de la population française ?
Après les attentats au Bataclan en 2015 et à Nice en 2016, les gestes qui sauvent ont été décrétés grande cause nationale. Malgré cela, six ans après, nous n'avons que 35 à 40 % de la population formée aux premiers secours. Concrètement, cela signifie que lorsque l'on est victime d'un arrêt cardiaque dans la rue, il faudra attendre que 6 à 7 personnes soient passées avant d'espérer croiser quelqu'un capable de pratiquer un massage cardiaque. Il y a clairement un déficit de communication sur l'intérêt de se former aux gestes qui sauvent. Il y a également chez certains la crainte de mal faire, alors que l'on sait que chaque minute qui s'écoule sans massage fait perdre 10 % de chance à la victime de s'en sortir. Chaque citoyen doit pouvoir être le premier maillon de la chaîne des secours.
Quels sont les enjeux ?
On estime que si 80 % de la population était formée, on pourrait éviter 20 000 décès par an. Certains pays européens ont atteint cet objectif. En Allemagne, cette formation aux gestes de premiers secours est obligatoire lors de l'apprentissage de la conduite. Il faudrait mieux l'intégrer dans le parcours scolaire, et pourquoi pas, cautionner la délivrance du permis de conduire à la présentation d'un certificat de compétences de citoyen de sécurité civile. Cela permettrait de renforcer la sensibilisation de la population sur l'intérêt de ces formations, ce que nous faisons déjà localement en étant très présents sur les réseaux sociaux. Mais, il faudrait surtout que l'altruisme des bénévoles, qui donnent de leur temps pour les autres, soit mieux valorisé à l'échelle nationale.
Comment expliquez-vous que cela marche bien en Allemagne par exemple ?
Depuis la crise sanitaire liée au Covid 19, on constate que le Français se tourne de plus en plus vers l'individualisme, alors qu'avant il était beaucoup plus solidaire. Au début de sa création, il y a neuf ans, notre association a enregistré une progression constante du nombre de ses membres et de ses activités, mais depuis trois ou quatre ans, le nombre de bénévoles est stable et repose sur des personnes ayant déjà un fort engagement citoyen. Afin de répondre à l'augmentation de notre activité, nous recrutons actuellement de nouveaux secouristes.
Renseignements complémentaires : www.udps87.fr
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