Limoges 15° C
lundi 31 mars

« Les ''bizarres'' sont convoyeurs d'une très grande richesse »

06h00 - 27 mars 2025 - par Propos recueillis par Anne-Marie MUIA
« Les ''bizarres'' sont convoyeurs d'une très grande richesse »
Maxime Jouaud, le président de RVAA

Le 2 avril a lieu la Journée mondiale de l'autisme. L'occasion de découvrir le Réseau des Villes Amicales pour l'Autisme, RVAA, avec Maxime Jouaud, son président.

Comment est né le Réseau des Villes Amicales pour l'Autisme ?

Nous sommes partis d'un constat : l'État prend de nombreuses décisions sur l'autisme. Or, le ruissellement ne fonctionne pas très bien. Les choses qui marchent sont les initiatives locales qui viennent du terrain.

Par ailleurs, à titre personnel, j'ai été diagnostiqué autiste sur le tard à 28 ans. Pourtant, il y avait des « indices » quand j'étais jeune : j'ai été harcelé au collège car, par exemple, je préférais collectionner les plumes d'oiseaux et tout ce qui concerne l'ornithologie plutôt que les Pokémon (rires). J'avais d'énormes facilités à l'école quand le sujet m'intéressait, mais j'avais du retard au CP. La maîtresse a dit à mes parents que j'étais débile et que je n'irais nulle part. Force est de constater qu'aujourd'hui avec un doctorat de neurosciences, je m'en suis pas mal sorti (rires). Mon fils a également été diagnostiqué autiste. Je ne voulais pas qu'il subisse les mêmes galères que moi enfant. Je souhaitais agir pour pouvoir changer ça.

Avec un groupe d'une quinzaine de personnes, issues du monde médical, journalistique, artistique, des chefs d'entreprise, nous avons donc créé une association pour inciter les territoires à agir sur la culture de la différence, de la neurodiversité, qui inclue les personnes en situation de handicap avec autisme, tous les DYS, les troubles de l'attention et de l'hyperactivité... En fait, la neurodiversité, ce sont tous les « bizarres » (rires).

À Panazol, la mairie avait mis en place plusieurs actions pour diffuser cette culture, en étant extrêmement accueillant et bienveillant pour les personnes autistes avec des sensibilisations dans les écoles, la semaine de l'autisme, des conférences pour le grand public, la formation d'élus... Aussi, nous avons pensé à encourager les municipalités à déployer la même énergie qu'à Panazol, qui était un « laboratoire test ». Le Réseau des Villes Amicales de l'Autisme est né ainsi en 2022.

Quels sont ses objectifs ?

Les objectifs sont divers : sensibiliser le grand public, créer un noyau de bénévoles actifs et volontaires, former des élus à la neurodiversité et à la différence, faire de la prévention spécifique en milieu scolaire contre le harcèlement, accompagner des projets originaux d'inclusion, favoriser les bonnes initiatives et inciter les municipalités à innover.

Connaître l'autisme ne s'improvise pas : la sensibilisation est une nécessité pour comprendre rapidement les tenants et les aboutissants de ces troubles. Cela permet un bien-vivre et un mieux-vivre ensemble dans la société, dans les entreprises. Les « bizarres » sont convoyeurs d'une très grande richesse.

Combien de villes sont membres du réseau ?

Nous comptons 18 villes et EPCI membres, dont 16 en Limousin ainsi que Mériel dans le Val-d'Oise et Bry-sur-Marne dans le Val-de-Marne. Nous utilisons le Limousin comme une « preuve de concept » (N.D.L.R. : démonstration de faisabilité). Si d'ici un an ou deux cela fonctionne bien, nous déploierons le réseau encore plus largement. Nous souhaitons faire les choses de manière rationnelle comme le fonctionnement d'une entreprise avec un système incrémental.

Le 2 avril est la Journée mondiale de l'autisme. Comprenez-vous que le grand public ait du mal à comprendre ce handicap multiforme ?

On ne parle plus de maladie mais d'un trouble du neurodéveloppement avec des spectres. La variabilité des symptômes inter-individuelle rend l'autisme difficile à appréhender pour le grand public non formé. Et les médias n'aident pas véhiculant une vision très ambivalente avec soit des autistes de très haut niveau, soit des autistes avec de très gros retards mentaux, alors que ça ne décrit absolument pas la réalité de l'autisme.

En revanche, il existe des caractéristiques récurrentes comme les difficultés de sociabilisation, les hyper-sensibilités sensorielles... En situation de stress, la personne autiste peut réagir différemment.

Comment se positionne la France en termes de diagnostic ?

Même si nous savons mieux poser les diagnostics, la France accuse un retard sur la cause de l'autisme, engendrant de multiples problèmes. Il est grand temps que l'autisme vienne sur le devant de la place publique et qu'on en entende davantage parler. L'Europe a sanctionné la France plusieurs fois face à ce retard de prise en charge. Des sanctions qui continuent...

L'accompagnement des parents et des familles est-il suffisant ?

Non. Il demeure de nombreux retards et réticences à faire tomber, même s'il y a des avancées avec la Maison de l'autisme qui va voir le jour l'année prochaine (cf. notre article ci-contre), le rôle reconnu des CRA, la formation de professionnels de santé, des enseignants notamment des classes ULIS, des AESH... Mais nous observons un manque notable de structures. Des dispositifs existent mais ils sont surchargés. Comme d'autres parents, pour mon fils, je suis sur un système rustine alors que, par définition, mon enfant a besoin de stabilité avec un emploi du temps stable et rigoureux.

ANIMATIONS DANS LE CADRE DE LA JOURNÉE DE L'AUTISME (non exhaustif)

CRA

Le 2 avril. À 13h30 à la faculté de lettres : Conférence " Autisme et apprentissage ". Gratuit. À 20h à Grand Écran Ester : Projection-débat En tongs au pied de l'Himalaya (7€ / Pré-réservation possible).

Infos et programme détaillé : www.cralimousin.com/journee-mondiale-de-lautisme-2025

LIMOGES

Le 2 avril. De 10h à 14h : Point information sensibilisation à la BFM centre-ville. À 14h et à 15h30 : Visites dédiées aux autistes au Musée des Beaux-Arts.

PANAZOL

Le 24 mars à 18h30, dans les locaux des Compagnons du Tour de France : Sensibilisation " l'Accueil de la Neurodiversité " à destination des commerçants, des artisans et chefs d'entreprise. Gratuit sur inscription : autismepanazol@gmail.com

Le 2 avril à 19h au centre culturel Jean-Cocteau : Spectacle Regardez-nous avec slam, musique, danse, projection de l'avant-projet du dessin animé Regarde-moi. Gratuit sur inscription : conservatoire@mairie-panazol.fr

BESSINES-SUR-GARTEMPE

Le 1er avril à 19h à la salle des Congrès : Conférence avec le Dr Lemonier autour du diagnostic, les signes, la prise en charge, présentation de MysDys.

Le 3 avril à 19h à la médiathèque : Projection-débat Mon fils, ma bataille.

Le 4 avril à 20h à la salle des Congrès : Soirée " Tous en bleu ".

BELLAC

Le 9 avril à 19h au Lux : Ciné-conférence " Les troubles autistiques, on en parle ? ", organisé par l'HIHL, autour du film En tongs au pied de l'Himalaya.

0 commentaires
Envoyer un commentaire